WisdomTree: Les matières premières ont enregistré de bonnes performances, en battant les obligations et l’immobilier et en suivant le rythme des actions mondiales, jusqu’en juin 2024
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Nitesh Shah, Head of Commodities and Macroeconomic Research, WisdomTree
Toutefois, si juillet a été difficile pour cette catégorie d’actifs, la volatilité inter-marchés a redistribué les cartes en août, qui a été un mois particulièrement inhabituel, avec des perturbations sur de nombreux actifs avant que la majorité d’entre eux ne clôturent à la hausse. Nous considérons que les événements d’août ont fait beaucoup de bruit pour pas grand-chose. Les chiffres décevants du marché du travail aux États-Unis publiés le 2 août ont déclenché une liquidation des actifs à risque, les investisseurs craignant que la Réserve fédérale américaine n’ait pas assoupli sa politique assez rapidement.
Le 5 août 2024, les actions japonaises ont connu leur pire journée de négociation depuis 1987, le Yen japonais s’étant apprécié face au dollar américain, ce qui a conduit à une réduction des opérations de carry trade. Cette situation a provoqué une vente massive à l’échelle mondiale, portant l’indice VIX (indice de volatilité du S&P 500) à un niveau intrajournalier supérieur à 60 le 5 août, un niveau que nous avions observé lors de la pandémie de COVID (ainsi que lors de la crise des dettes souveraines de 2011 et de la crise financière mondiale de 2008). Les indices OVX (volatilité des prix du pétrole) et MOVE (volatilité des marchés obligataires) ont également connu des hausses importantes, atteignant des niveaux élevés pendant plusieurs mois, sans toutefois égaler la hausse observée sur le marché des actions.
Les marchés ont néanmoins regagné une certaine stabilité assez rapidement. Le S&P 500, l’indice MSCI World et l’indice Bloomberg Commodity ont tous retrouvé, voire dépassé, les niveaux atteints début août avant la vente massive de ce même mois, et cela malgré un mois de juillet déjà difficile pour les matières premières. L’immobilier et les obligations souveraines ont connu une accélération en août, après avoir semblé à la traîne jusqu’à la mi-juillet. En d’autres termes, les matières premières occupent désormais la dernière place, n’atteignant même pas les performances des liquidités.
Source : WisdomTree, Bloomberg. Du 31 décembre 2023 au 26 août 2024. Tous les rendements sont exprimés en USD. Données : Données : Actions : MSCI World, Obligations : Bloomberg Barclays Agg Sovereign TR Unhedged, Immobilier : EPRA/NAREIT Global, indice Bloomberg Commodity Total Return, Liquidités : bons du Trésor américain à 3 mois.
Quels sont alors les espoirs de rattrapage ? D’un côté, les baisses de taux à venir constituent un facteur positif. De l’autre, l’élection présidentielle américaine pourrait affecter la politique commerciale mondiale.
Début du cycle de réduction des taux d’intérêt
Si les États-Unis adoptent le 18 septembre prochain une politique de réduction des taux d’intérêt similaire à celle du Canada et d’autres pays européens, nous pensons que cela donnera un coup de pouce supplémentaire à l’économie mondiale. La Chine attend que les autres pays assouplissent leurs conditions monétaires avant de passer à l’action. Un soutien politique supplémentaire de la part du plus grand consommateur de matières premières au monde devrait constituer une aubaine pour cette classe d’actifs.
Les baisses des taux d’intérêt américains ont toujours favorisé une hausse des prix réels des matières premières (illustration 2). Nous constatons que cette relation s’est inversée lors de la chute des prix du pétrole dans les années 1980. Pendant la crise de la COVID, bien que des taux plus bas aient été favorables aux matières premières (avec un bêta similaire à celui des autres périodes), l’impact du choc a généralement conduit à une baisse des prix (alpha inférieur).
Source : WisdomTree, Bloomberg, données de juin 1976 à juin 2024. Prix réels des matières premières calculés à partir de l’indice Bloomberg Commodity Price et de l’indice des prix à la consommation aux États-Unis. Taux d’intérêt réels calculés à partir des bons du Trésor américain nominaux à 2 ans et de l’indice des prix à la consommation aux États-Unis. La période 1982-1985 est caractérisée par un choc défavorable des prix du pétrole. La période 2020-2022 est marquée par celui de la COVID. « Linéaire » correspond à la droite de régression pour l’ensemble de données pertinent. Les équations de régression sont annotées sur le graphique, où « y » représente le prix réel des matières premières (variable dépendante) et « x » le taux d’intérêt réel (variable indépendante). R2 nous indique dans quelle mesure la variation de la variable dépendante est expliquée par la variable indépendante (échelle de 0 à 1).
Commerce international
L’année 2024 est marquée par une activité électorale soutenue qui devrait se poursuivre. L’élection présidentielle américaine est clairement l’un des événements majeurs de cette année. Trump et son colistier Vance ont axé leur campagne sur une volonté de durcir les politiques commerciales. S’ils réussissent à gagner la Maison-Blanche et à appliquer leurs politiques de campagne, nous pourrions être confrontés à un choc commercial défavorable, ce qui est susceptible, à terme, d’impacter négativement les prix des matières premières. L’illustration 3 indique qu’une diminution des volumes d’exportation a historiquement été associée à une diminution des prix des matières premières. À l’heure où nous écrivons ces lignes, les sondages indiquent une course serrée entre Trump et Harris, et les enseignements tirés des élections en France, au Royaume-Uni et en Inde soulignent le caractère imprévisible des résultats ainsi que la possibilité de nombreux retournements de situation.
Source : WisdomTree, Bloomberg, Organisation mondiale du commerce. 1979-2023. Matières premières représentées par l’indice Bloomberg Commodity Price.
La mise en place des projets de Trump visant à imposer des tarifs douaniers importants sur les importations américaines pourrait prendre plusieurs mois. Avec une investiture le 20 janvier 2025 et en supposant un traitement accéléré de trois à quatre mois s’appuyant sur le recours à la Section 301 par le Bureau du représentant au commerce des États-Unis[1], auxquels s’ajoute un délai d’un mois pour la signature, ces mesures seraient effectives à la mi-2025. D’ici là, les banques centrales du monde entier auront procédé à plusieurs réductions de taux d’intérêt, stimulant ainsi l’économie mondiale. Comme nous l’avons évoqué précédemment, l’or bénéficiera de la relance monétaire, mais les craintes d’une guerre commerciale pourraient entraîner une augmentation encore plus importante du prix du métal précieux. L’or est souvent considéré comme une couverture contre les turbulences géopolitiques et économiques.
Nous soulignons qu’au moment de la rédaction de ces lignes, nous ne savons pas qui sera le prochain président. En cas de victoire de Kamala Harris, il est probable que les États-Unis adoptent également une politique commerciale plus stricte (bien qu’il ne s’agisse pas de l’élément central de sa campagne). En mai 2024, le président Biden a annoncé un élargissement des tarifs douaniers au titre de la Section 301 sur un certain nombre d’importations chinoises afin d’y inclure les panneaux solaires, les véhicules électriques, les batteries, les intrants de chaîne d’approvisionnement en énergie verte, les grues portuaires navire-terre, les produits en acier, les produits en aluminium, les seringues médicales et les équipements de protection individuelle (EPI). En cas d’adoption, certaines des nouvelles mesures tarifaires prendraient effet dès cette année, avec une mise en œuvre progressive entre 2025 et 2026. Des exclusions spécifiques ont néanmoins été établies. Par exemple, l’augmentation des tarifs douaniers relatifs aux batteries exclut les batteries lithium-ion destinées aux véhicules électriques.
L’année dernière, l’Union européenne a introduit le Règlement relatif aux subventions étrangères (RSE). Ces nouvelles règles permettent à la Commission européenne de gérer les distorsions provoquées par les subventions étrangères. Les règles limitent les investissements lorsque des entreprises non européennes bénéficient indûment de subventions fournies par leurs propres gouvernements. Plusieurs fabricants chinois de technologies propres sont actuellement visés par ces investigations. L’application de ces nouvelles règles pourrait également entraîner une baisse des échanges commerciaux avec l’UE.
[1] La section 301 de la loi sur le commerce de 1974 accorde au Bureau du représentant au commerce des États-Unis (United States Trade Representative, USTR) un éventail de responsabilités et de pouvoirs pour enquêter et prendre des mesures visant à faire appliquer les droits américains en vertu des accords commerciaux, ainsi qu’à réagir face à certaines pratiques commerciales étrangères. Avant l’administration Trump et depuis la création de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en 1995, les États-Unis ont principalement eu recours à la Section 301 pour constituer des dossiers et engager des procédures de règlement des différends au sein de l’OMC. L’ancien président Trump a été plus enclin que ses prédécesseurs à agir de manière unilatérale en vertu de ces pouvoirs.
Source: ETFWorld
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